Pour l’Association des chefs de village du département de Vélingara, la localité a des atouts pour et tout à gagner à être érigée en région administrative : la proximité de certains services déconcentrés et les opportunités d’emplois et d’investissements. Par contre, Chérif Sabaly croit qu’on ne doit pas créer de nouvelles entités locales qui doivent coûter plus cher à l’Etat alors qu’elles sont économiquement moins viables.

Par Abdoulaye KAMARA – Dimanche 29 janvier, les chefs de village du département de Vélingara s’étaient réunis dans la salle des réunions de la mairie de Saré Coly Sallé pour «remercier le chef de l’Etat pour toutes les initiatives entreprises pour la valorisation du statut du chef de village, notamment en leur attribuant des indemnités conséquentes, mais aussi pour réclamer l’érection du département de Vélingara en région». Ces mots de M. Aliou Badara Baldé, président de l’Association des chefs de village du département, à l’issue de la rencontre, sont une forme de reconnaissance présidentielle. Insistant sur l’érection du département en région, il justifie ainsi leur proposition : «C’est pour rapprocher l’Administration des administrés. Imaginez que certains citoyens de Vélingara font plus de 300 km aller-retour pour chercher un casier judiciaire ou tout autre document administratif pour compléter des dossiers de candidature à des offres de prestations de services, des concours professionnels ou des examens scolaires. C’est énorme comme effort physique et financier. Il faut aussi dire qu’il y a de réelles difficultés à se déplacer à partir de certains coins du département du fait de l’état des routes et de la rareté des véhicules de transport public.» Ces élèves et étudiants, candidats à des concours professionnels, en arrivent à être frappés de forclusion pour cause de retard ou de lourdeur des démarches préalables à effectuer, loin de leur lieu de résidence. Pas que cela. Cet infirmier à la retraite, chef du village de Saré Bassy, ajoute : «Nous sommes plus de 300 mille habitants dans un terroir qui fait 5434 km2 de superficie, et 664 villages et hameaux. Le département fait 2 fois la superficie de la région de Thiès.»

Une idée que partage Cheikh Dieng, conseiller départemental de l’Apr, qui soutient : «Pour une bonne promotion des ressources humaines et une libération des énergies endogènes, il faut que Vélingara soit érigé en région administrative. Tout le monde peut constater que Vélingara ne parvient pas à émerger parce que c’est Kolda département qui prend tout : les nominations et les investissements. Sur le plan politique, Vélingara travaille pour Kolda alors que sur les plans économique et humain, il n’y a pas photo entre Vélin­gara et les 2 autres départements de la région : nous avons 2 barrages hydro-agricoles, 2 importants marchés hebdomadaires, le plus gros cheptel de la région. Notre situation géographique, notre département est frontalier à 3 pays, suffit pour nous ériger en région à défaut d’en faire un département spécial à l’image de Mbour.» Et puis, ajoute-t-il : «Une région, c’est beaucoup de nouveaux services, l’implantation d’Ong et donc d’opportunités d’emplois et d’investissements. Sédhiou a décollé en tant que nouvelle région administrative.»

Chérif Sabaly, la voix discordante
Par contre, il y a une voix discordante. Il s’agit de Chérif Sabaly, président du Conseil d’administration de la Sodagri. Pour ce militant de la première heure de l’Apr, «l’idée de faire de Vélingara une région administrative n’est pas nouvelle. Elle avait été agitée en 2011 par feu Mamadou Bayo, alors vice-président du Conseil régional de Kolda. J’ai eu une position contraire. Et je reste constant dans cette position». Il argumente : «A mon avis, l’émiettement des collectivités territoriales est le principal frein au développement de nos terroirs. Créer une région, c’est créer d’autres départements, d’autres communes et donc recruter d’autres préfets et autres. C’est demander à l’Etat de payer plus cher pour administrer Vélingara, créer d’autres postes de dépenses. C’est créer d’autres communes qui ne seront pas viables économiquement, parce qu’il se posera forcément un problème de ressources.» D’ailleurs, croit M. Sabaly, «il faudra que le Sénégal revienne sur les 7 régions qui existaient à l’indépendance du pays, c’est plus viable et mieux gérable». Pour cet autre citoyen qui préfère garder l’anonymat, «il faut dire que cette position est souvent défendue par les hommes politiques. Parce que cela induit de nouvelles responsabilités politiques au niveau des institutions, mais aussi des postes de responsabilité au niveau des directions nationales et de l’appareil d’Etat. Je veux parler des nominations. C’est tout ce qui les intéresse. Nous avons tous vu qu’il y a ici chez nous des communes qui ne peuvent pas décoller du fait de l’étroitesse de leur marché et de l’inexistence de niches de création de richesse à l’interne».
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